n° 217 Hiver 2001

 

L'Edito par Lucien AURARD

 

I

Je ne connais pas bien Paul Claudel. Je le savais poète et écrivain. Je connaissais de nom plusieurs de ses oeuvres : le Partage de midi, l'Otage, le Pain dur, l'Annonce faite à Marie. Je le savais grand voyageur et grand ambassadeur. Je savais que le 25 décembre 1886, pendant les vêpres à Notre Dame, au chant de l'Adeste fideles, il s'était converti. Mais je savais aussi qu'il était à l'index. Il était rangé dans les rangs de la vieille France aux valeurs nostalgiques et suspectes. En mai 1968, on pouvait lire sur les murs de la Sorbonne : " Plus jamais Claudel " !

Le voilà, aujourd'hui, de retour. Paul Claudel, cette année, est de nouveau joué sur de nombreuses scènes à Paris comme en province. Il n'est pas de revues, d'hebdomadaires ou de quotidiens qui ne parlent de son retour. Et il semble qu'il faut chercher le secret de ce retour dans ce qu'il dit de l'homme et de lui-même. Paul Claudel est un passionné. S'il est homme de convictions, il ne cache rien de tous les combats qu'il a essayé de mener et qu'il a perdu souvent contre ses faiblesses. Faut-il comprendre qu'en ces temps, davantage faits de doutes que de certitudes, celui qui témoigne du ciel ne peut être entendu que s'il n'oublie pas qu'il est fortement enraciné en pleine humanité ? " Le Royaume, tel que le pressent Claudel, tel qu'il l'appelle, et même qu'il voudrait le hâter est celui qui descend parmi les hommes, dans l'épaisseur de leur doute, dans l'obscurité de leur âme, dans les contradictions de leurs vies ", écrit Jean-François Bouthors dans la Croix et il poursuit : " Ne cherchez pas chez lui des petits saints, il n'y en a point. Les âmes qu'il invite sur scène, avant même d'être fortes sont passionnées, emportées, entières. Excessives. Comme si, pour Claudel, il fallait cette violence de la chair pour convoquer le salut. "

 

II

Claudel, le converti du 25 décembre, a bien reçu le message de Noël. C'est l'homme, bien sûr, qui est au coeur du mystère de Noël. Pour nous chrétiens, dire notre foi, vivre notre foi, c'est ne jamais oublier que rien n'est insignifiant, rien n'est petit lorsqu'il s'agit de l'homme. Dieu est au coeur de nos vies humaines. Dieu a pris visage d'homme. Fuir ou essayer de se cacher ce qui agite, ce qui traverse, ce qui parfois ravage notre coeur, c'est perdre son temps et gaspiller sa vie. Claudel ne cache pas qu'il est en pleine incarnation. C'est sûrement le secret de sa modernité. La valeur de Claudel qui écrit et fait jouer ce qu'il est et ce qu'il vit jusqu'à prendre en compte toutes les contradictions qui relativisent ses propres convictions, a fini par prendre le pas sur l'image que l'on se faisait de lui. Il paraît qu'un critique, Albert Thibaudet disait de ce poète qui " envisage tout avec un coeur catholique " qu'il est " le plus gros paquet de mer poétique que nous ayons reçu depuis Hugo ".

Notre monde n'est pas facile. On ne se fait pas trop de cadeaux. Mais on est libre et on peut être vrai. Vous vous doutez, bien sûr, que ce ne sont pas des enfants de choeurs qui choisissent de jouer Paul Claudel. Les metteurs en scène qui le regardent jusqu'au fond des yeux avec admiration sont des plus laïques et ce sont tous de grands artistes : Jean Pierre Vincent à Nanterre, Bernard Sobel à Gennevilliers, Laurent Fisbach à Vichy, Matthew Jocelyn à l'Athénée. Quelle leçon ! Quelle humilité et quelle force pour tous les messagers de la Bonne Nouvelle ! Nous vivons des temps nouveaux pour l'Evangile. Si l'Evangile est dit en vérité, en pleine humanité, chez nous, en ces temps heureux de liberté et de vérité, il est reçu à bras ouverts, comme une force de paix par tous les hommes de bonne volonté.

Je crois bien que c'est ça le message de Noël.

 

Un article : Courage ! (Libre propos) par Anne CAMBOULIVES

 

I

Son coour bat, c'est bientôt son tour. Ce qu'il a préparé, lui, est si différent de ses petits copains. La maîtresse, à la veille des vacances, leur a proposé un «sujet libre» en expression écrite, et en ce moment, chacun à tour de rôle lit son texte. Depuis près d'une heure tous racontent la même chose, à peu près: le dernier film qu'ils ont vu. Et boum et tchoc et vlan et «prends ça !» Geste et onomatopées à l'appui, Nicolas voit des hommes sauter, crier, s'entre-tuer, des robots effrayants, des sirènes hurlantes, du sang des ricanements de satisfaction ou encore des femmes se pâmer sous les baisers d'un jeune coq.
Il n'est plus très sûr qu'il va oser raconter son film à lui. Ses parents n'ont pas la télé: ils lui lisent des histoires, le soir. Sa préférée, c'est son grand-père qui la lui a contée, quand il n'était encore qu'un tout petit garçon. Mais voilà, c'est son tour, il n'a plus le temps de se poser des questions; Tremblant légèrement, il se lance...

 

III

Elle a dit oui. Son fiancé en a pris un coup tout de même, il ne s'était jamais préparé à être un père adoptif et à cette époque là les hommes ne rigolaient pas avec leur honneur. Mais lui aussi avait reçu en rêve la visite d'un ange qui lui avait demandé de ne rien changer à ses projets de mariage. C'était un homme noble de creur, donc courageux, et il l'a fait. Peu de temps après, sur ordre de l'empereur, il dut quitter leur village et entreprendre un long voyage pour se faire recenser dans le pays d'origine de sa famille. A cette époque le moyen de locomotion le plus courant, c'était un âne, il installa dessus sa femme, et ils se mirent en route. Lorsque le moment de la naissance fut venu, il n'y avait plus aucune place nulle part. Alors, tendrem'ent, il la mit à l'abri dans une étable, déroula les tissus qu'ils avaient emportés, pour lui faire un lit douilet sur la paille; il fabriqua, car il était charpentier et savait travailler le bois, un joli berceau, quoique rudimentaire et. ..
Mais la cloche à ce moment-là retentit et Nicolas ne put terminer son histoire. au fur et à mesure de sa lecture sa voix s'était affermie, comme soutenue par une force invisible. Un silence attentif avait remplacé les sourires moqueurs du début.

II

Il était une fois une très jeune fille, elle avait à peine 16 ans. Toute simple, cette jolie brunette vivait sagement entre ses parents et jamais un seul jour elle n'aurait oublié de faire sa prière. Oh, pas par obéissance, à vrai dire. Elle éprouvait une telle paix en s'adressant à Dieu, sa confiance était si totale qu'elle se sentait toute légère et emplie de gratitude en parlant avec Lui. Aussi les jours de sa vie se déroulaient-ils dans la sérénité, sans surprise; elle était contente d'avoir un destin tout tracé: bientôt elle allait se marier, et comme tous ses ancêtres avant elle, à son tour elle mettrait au monde des enfants. C'était compter sans celui que précisément elle priait chaque jour, qui avait pour elle un autre projet, et celui-ci ne ressemblait pas du tout à un long fleuve tranquille! Un jour un ange vint lui annoncer que Dieu l'avait choisie pour être la mère de son fils et par son intermédiaire lui demandait, à elle, cette si jeune fille, si elle était d'accord !!
-Qu'aurais-tu fait à sa place ? me demanda mon grand-père.
Mais il n'attendit pas ma réponse. Avec son joli accent du midi, déjà il continuait.

IV

Aujourd'hui les bébés, ils naissent à l'hôpital !» fit pourtant remarquer l'un d'eux.
Mais pourquoi Dieu a-t-il voulu un fils ? Et pourquoi n'a-t-il It pas plutôt choisi une princesse ?» demanda une petite fille.
Où était-ce, à quelle époque, comment s'appelaient-ils ?»
Que s'est-il passé ensuite, tu as dit que la vie de la jeune fille n'allait pas être un long fleuve tranquille. ..et son fils, le fils de Dieu ?»
Et oui, ce serait long, très long, de raconter la suite, et très intéressant, puisqu'il s'agit de notre vie à nous les hommes, et de nos relations, sereines parfois, tumultueuse plus souvent, conflictuelles presque toujours avec Dieu, qui nous appelle à dire oui à la vie: ce n'est pas si facile! Il faut avoir du courage pour être chrétien (d'après Hervé, le Père Aveyran dit les choses plus crûment...). Quand les parents ne se sentent pas trop capables de transmettre eux-même, ils peuvent toujours avoir recours aux catéchistes ?

... en tout et partout... des chrétiens heureux... par Hervé d'Anselme

Plaisir... (d'être ensemble)

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C'est dans la bonne humeur générale que nous avons réalisé cette " photo de classe " de la rentrée paroissiale (le 21.10). En attendant les bouchons à la porte du paradis, proffitez-en, la cour du presbytère est suffisament grande pour que chacun trouve sa place... D'après mes sources d'information, la photo devrait, en plus, vous servir de laisser passer...
Humour... (jaune, noir ?)   Joie... (se former pour donner)   Fête... (toujours plus loin !)
" Tout fout le camp... ". Si cette expression est vraie pour la " catéchèse " : à peine 30 jeunes inscrits... par contre, il n'est pas possible de l'appliquer pour la rubrique " obsèques " : plus de 150 pour l'année ! Mais " n'ayez pas peur ", nous n'avons pas dit notre dernier mot... et Dieu non plus !   Cette année, dans le diocèse, ce sont les grands textes du concile Vatican II qui sont particulièrement approfondis. Sur nos paroisses, également, nous prenons le temps de les parcourir. LG, DV, GS, SC... " Père, je te rends grâce d'avoir révélé ça aux petits... " Il reste encore AL, AM, DOE... autant dire que nous n'avons pas fini de rendre grâce !   L'assemblée diocésaine (10 ans après le synode) s'est tenue les 10 et 11 Novembre dernier. Un peu plus de 100 participants ont affiné les propositions que vous aviez pu formuler l'an dernier. Le document final sera (prochainement) mis à votre disposition sous le titre " Avance au large... ". Tracer de nouveaux chemins, c'est le propre de toute nouvelle génération... Si le ''beaujolais nouveau'' est l'une de ces innovations du 20° siècle, laissons-nous désormais enivrer par ce document qui est le fruit de la terre et du travail des hommes !
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Euro... (vous avez dit heureux ?)

Le passage à l'Euro fait désormais partie des " réalités " incontournables de la vie de chacun. L'Eglise n'y échappe pas et, pour elle, la question est de taille. C'est donc à l'échelon national qu'une campagne est menée pour " préparer " les portes-monnaies. Le slogan se résume ainsi " Faites-en une chance pour l'Eglise "... En soit, le principe est simple : Si vous donnez 1 euro à la place du " traditionnel " 10 francs, cela fera plus de 30 % de baisse !!! Aussi, chacun est invité (appelé, encouragé...) à enrober sa pièce de beaucoup d'amour (votre générosité) pour " transformer " sa participation et lui faire prendre le visage d'une pièce de 2 euros qui, pour l'occasion, est baptisée " euro-chrétien heureux "... Vous n'avez pas tout compris... ça n'est pas grave, l'important c'est de participer ... largement... Dieu vous le rendra au centuple !

 

 

En parcourant nos quartiers et nos rues - 9 par Michel HAYEZ

I

Presque en face de la villa Mireille (n°33), un ensemble de bâtiments publics retient notre attention: école primaire (n°22) et «maison pour tous» du quartier. Tout commença sur ce vaste quadrilatère avec l'usine de traitement des eaux, entreprise de captage du puits de Monclar pour les conduire dans les réservoirs du jardin des Doms, que la municipalité concéda en 1863 à un certain Godfernaux, qui céda lui-même à la banque générale suisse (1865) ; nouveau transfert (1869) à la Compagnie anonyme des eaux de la ville. Celle-ci acheta bâtiments et matériel pour les mettre en régie directe (500.000 fr. en 1876), rénova la machine élévatoire à vapeur en 1892. Henri Bosco ne ménageait pas ses sarcasmes à l'égard de cette grande pompe à eau «qui, a chaque coup de piston, fournissait notre ville en milliards de microbes, la plupart mortels. ..». Il est exact que des épidémies de fièvre typhoïde se déclaraient en octobre 1909, Juillet-Août 1912... L'usine fut remplacée en 1935 par celle de la Signone, route de Marseille (Montfavet). Voulant supprimer les nombreux lavoirs particuliers - l'avenue de l' Arrousaire en comptait 16 -, pour des questions d 'hygiène, la municipalité Poncet fit construire à proximité de l'usine, sur 5.000 m2, un grand lavoir public en 1885-1887, comprenant à l'étage le séchoir ventilé au long de ses treize travées par des baies fermées de claires-voies qui lui donnaient l'aspect de halles. Simultanément sur le même terain, fut créée en 1888 une petite école publique maternelle et de filles, alors que les garçons continuaient à fréquenter les écoles intra-muros jusqu'à la construction de celle de St-Roch en 1900-1902. H. Bosco la qualifiait de "la plus sinistre école maternelle de la ville". Elle connut une extension progressive en 1903, 1909, et surtout lorsque fut mis à sa disposition l'ancien séchoir du premier étage (2 classes en 1932, une en 1937). L'école des garçons de St-Ruf bénéficia au même étage de classes nouvelles (2 en 1933, une en
1937). Le promeneur remarquera en divers endroits de ces bâtiments, au sommet des murs d'angles, de lourds entablements qui donnent une unité certaine à l'ensemble.

En face, une maison (n°41-43) dont quelques fenêtres ont un arc outrepassé, affiche commodément pour les historiens de l'urbanisme, sa date de contruction : 1896-1897.

Du côté pair se présente (n°30) la mairie-annexe du quartier ouest, transférée ici en 1993 depuis le boulevard Jacques-Monod (n°20). Elle a succédé à la clinique St-Jean, créée vers 1923 par le Docteur Emile Godlewski, reprise par le Dr Rebouljusqu'en 1978.

A l'angle du boulevard Jules-Ferry (n°32: cabinets dentaires), s'élève imposante une villa que, selon toute vraissemblance, se fit construire vers 1900 l'avocat Albert Carcassonne (né à l'Isle-sur-le-Sorgue en 1857), premier avocat juif d'Avignon à s'inscrire au barreau en 1887. Sa veuve y demeura, mais la maison fut séquestrée et devînt le siège de la Gestapo de février 1943 à la Libération.

II

En vis à vis, à l'angle du boulevard Jacques Monod, la pharmacie représente vraissemblablement l'officine créée vers 1941 par Mlle Goutalier. En face, l'enseigne de la boucherie (n°57) résiste depuis environ un siècle aux transformations immobilières du voisinage. Plus loin, au coin de la rue J.B. Franque, apparaît la maison (n°75) du poète majoral du Félibrige, Michel-Benoît (Benezet) Bruneau (1852-1941 ), surnommé «1ou Barrulaire» ( "le rouleur" , disons plus aimablement «1e flâneur» ). Sa production se situe vers 1879-1932, surtout dans des journaux tels que «1a Croix», «1' Aioli», parfois signée «Baroun d'Euse», mais l'on peut citer ici «1a Vèio de Nouvè en famiho» (1914), «Proumenado à Moun-ClaD>, «1es Aigo que bevon les Avignounen» (1932). Au fur et à mesure que l'on s'éloigne des remparts,
numérotation et identification des maisons deviennent plus floues. L'ancienne ferme-laiterie de la famille Fra (n°60), construite partiellement en «tapi» (ou pisé), matériau caractéristique de la vallée de la Durance, abrite depuis plus d'un siècle les descendants des familles Emmanuelli et Bergero venues de la province de Turin pour exercer la profession de laitiers. Le côté pair de l'avenue aux abords des avenues de la Violette et Martelange, présente trois demeures avec parc dont les hautes frondaisons protègent le mystère cher à Bosco, avant d'atteindre, côté impair un «coron», suite assez longue de logements ouvriers où vivaient à la veille de la guerre de 1939-1944 les familles de mécaniciens et employés du chemin de fer. Mais ne quittons pas cette avenue Monclar sans évoquer l'une des plus anciennes familles du quartier, les Firmin. Déjà en 1851, le cultivateur Jean Firmin, âgé de 45 ans, élevait dans le quartier de Champfleury trois fils, Claude (13 ans), Jean (8 ans) et Nicolas (7 ans). Il ne peut s'agir du peintre Claude (1864-1944) élève à Paris de Léon Bonnat, qui vécut ici, au-delà de l'avenue des Deux-routes, tandis que son frère Sylvestre (né en 1865), agriculteur voisin, fut le père de Marius Firmin (né en 1900), curé de St-Ruf à partir de 1947 et dont nous reproduisons par extraits le livre paroissial. Sources: recensements de population et annuaires aux Archives départementales; M. Lechalier, Domaine public et privé de la ville d'Avignon, 1938 ; R. Bailly, Avignon hors-les-murs, 1967; R. Grosso dir., Histoire de Vaucluse, ...des campagnes à la ville, 1993.

 

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