n° 212 Automne 2000

 

L'Edito par Lucien AURARD
Notre secteur paroissial de Saint-Ruf Saint-Joseph vit en définitive au rythme de l’année scolaire. Pour nous aussi c’est la rentrée. C’est pourquoi il nous a semblé important de présenter, dans ce numéro de l’Estello, la vie de la paroisse. Vous y trouverez des informations et des propositions pour l’année pastorale qui commence, un témoignage sur trois temps forts des J.M.J., une présentation du collège Champfleury dont la direction est à présent entre les mains d’une enseignante laïque, des souvenirs de Saint-Ruf autrefois et d’autres nouvelles encore. Notre paroisse, vous le voyez, a le souci de toujours bien se situer au cœur de la vie de notre quartier pour vous y rejoindre, créer des liens et ainsi répondre à sa mission d’Eglise qui est de servir la vie des hommes et de vivre l’Evangile du Christ. Après l’été, l’année du Jubilé se poursuit. Cette année de bienfaits est une année d’espérance.Une espérance forte, enracinée en profondeur dans Celui qui est venu sauver tous les hommes ; une espérance qui puise sa force en s’appuyant toujours davantage sur ce qui fait le cœur du mystère de la foi. C’est toute l’orientation de la Lettre aux catholiques de France que nous ont adressée les évêques en 1996 et dont nous n’avons pas encore fini de mesurer la portée. Il serait bien que cette année pastorale offre à chacun l’occasion d’une vraie réflexion sur la Proposition de la foi dans la société actuelle.

Quelle est notre espérance ? C’est une question que nous pouvons nous poser en ce début d’année pastorale. Qui est celui qui est notre espérance ? De cette réflexion toujours reprise et nécessairement approfondie par l’expérience de la vie, les joies et les épreuves de chaque jour, peut jaillir un nouvel élan qui nous pousse vers les autres, avec un regard qui invite à l’accueil, au service et au partage.

 

C’est toujours l’année du Jubilé. Nous continuerons à approfondir le mystère de la foi qui nous habite pour apprécier l’espérance qui doit être la nôtre. C’est la rentrée. Nous faisons route ensemble.

 

Un article : Des histoires... qui font notre histoire par Hervé d'ANSELME et...

Depuis l’année de sa création (1912), vous pouvez imaginer qu’il s’en est passé des « histoires », dans notre paroisse ! Je suis allé à la recherche de quelques-unes unes d’entre elles et si ma pèche n’a pas été miraculeuse, les anecdotes qui suivent sont comme autant de grains semés en terre qui rejaillissent aujourd'hui en arbre de vie.

C’est bien souvent à l’insu de « leurs » auteurs que ces faits de vie ont été relevés par l’un ou l’autre. Aussi, des années plus tard, « ils » sont toujours là, présents et vivants dans nos mémoires. C’est grâce à eux aussi que s’écrit la vie de notre paroisse… alors n’hésitez pas, semez et plantez, sans compter, aujourd'hui, d’autres sauront, plus tard en faire de jolis bouquets !

I

En 1951, dans les classes de l'école primaire des filles de la paroisse Saint-Ruf, circulaient des photos provoquant le sourire des élèves. La directrice de la clinique du Dr Godlewski, Mme Lemore, Mlle Marie-Yolande Pitras et un abbé en soutane (bel équipage sur une barque à fond plat), naviguaient sur les boulevards Sixte-Isnard, Gambetta et l'avenue de la Violette. Des photos témoignent encore aujourd'hui des inondations de 1951.                                                                                          P. Robert Chave

II

Louis Marcellin… un merveilleux sacristain qui logeait au sud du chevet de l'église Saint-Ruf. Toujours présent : à mon baptême, le 16 août 1924, à ma confirmation en 1935 et pendant mon ministère de vicaire à Saint-Ruf J'aimais rappeler cela aux familles qui présentaient leur enfant au baptême.

P. Robert Chave

III

Le 13 juin 1948

Le presbytère ayant été détruit lors des bombardements, une nouvelle maison fut construite en face de l’église.

L’archevêque, Monseigneur de Liobet, veint la bénir le 13 juin 1948. J’ai assisté à la cérémonie. À mon retour je raconte à maman : « on était dans le jardin de Monsieur le curé... il y avait la bétonneuse... » « Quel est ce nouvel abbé ? » me demande maman !!!

Yolande Pitras

IV

Lorsque les laïcs ont pu distribuer la communion, voici quelles remarques on entendait

- "merci monsieur"

- une dame me rapporte une hostie : "monsieur, vous m'en avez donné deux ! "

- une autre dame s'aperçoit qu'il manque un petit morceau à son hostie "monsieur, j'en veux une entière"

- je donne à un paroissien un morceau de la grande hostie "ah non monsieur, j'en veux une vraie !                                        Gaby Bernard

V

Une " histoire " de l'hiver 1990

Lundi : Sortie de messe du matin 9h30. Mme X : « Père, ma voisine "sentait le froid" ». Ils ne peuvent plus payer le mazoute » l0h : téléphone au distributeur "Veuillez livrer du mazout à telle adresse, remplissez la citerne. Envoyez-nous la facture" 14h. C'est fait.

Mardi  : Facture réglée.

Mercredi : par hasard, conversation avec un responsable du Secours Catholique - "Donnez-moi la facture"

Jeudi  : Nous sommes remboursés.

Dimanche : 8h45 : Un fidèle paroissien, bien en avance. Je m'approche pour le saluer. De sa poche, il extrait un petit paquet - comme un tube pharmaceutique... plié dans du papier journal... "Pour le Secours Catholique " me dit-il. Ce sont des pièces d'or. A très peu près, l'équivalent de la facture.

J'apprends, quelques jours après, que le "donateur" est fâché depuis longtemps avec ces "très proches" que sans qu'il le sache il va chauffer tout l'hiver... !

Réseau souterrain de l'humour-amour de Dieu. Tandis que le diable se mord les doigts, Notre Père sourit doucement dans sa barbe. La barbe est fausse bien sûr, mais l'histoire rigoureusement vraie.

"Tu es bon Seigneur, Tu es joie... éternellement                                                                                                                                Frère André Raymond

VI (début)

C'était il y a bien longtemps de cela, avant la guerre de 39-45, bien sur, pas celle de 14-18. Le curé de la paroisse était le chanoine CABROL. Nous étions nombreux à la chorale. Nous chantions dans le choeur, derrière le grand autel qui séparait, outre les 3 marches, le choeur de la nef. En entrant à l'église on "payait" la chaise et au cours de la messe une quête ordinaire, une autre de temps en temps et a chaque messe quête pour les âmes du purgatoire. Celle-ci était faite par Louis le frère de la chaisière. Louis était un tout petit bonhomme, sec comme un coup de trique. II remuait le tronc en fer en disant "Requiescat in patché" (qu'il repose en paix) Un farceur à chaque fois lui disait : Louis si tu me dis encore "Resquille quand je passe" je te donne une autre pièce.

Puis , ce fut le chanoine FIRMIN qui le remplaça. Ce jour là, je languissais la fin de la messe car je désirais présenter au curé Geneviève, ma fiancée. J'étais à la fois joyeux et ému. Quelle douche ! Pas un mot d'accueil, pas un sourire, une simple question : Elle est de quelle paroisse ? - Du SacréCoeur -Tu n'as pas été capable d'en prendre une dans ta paroisse ?

Brave Père FIRMIN ! Comment auriez vous pu penser à tout le travail que vous alliez faire avec Geneviève?

Ce jour-là, nous entrions à la sacristie et tout en ôtant les vêtements le curé me dit (c'était après Vatican II) - Tu vois Gaby, j'ai dit la messe en français : eh bien, je n'ai pas l'impression d'avoir célébré la messe... Puis avec un gros soupir - Mais si c'est pour le bien du monde, je n'ai rien à dire. "Chapeau Monsieur le Curé"

Nous étions un certain nombre de maris, pas trop "machos". Notre désir : que nos femmes puissent faire une lecture pendant la messe. Le curé, le moins qu'on puisse dire, n'était pas enthousiaste. Petit à petit l'idée a fait son chemin...: Une femme peut lire, mais à condition qu'elle soit devant la grille séparant le choeur de la nef.

La seule allusion à la différence entre loi et esprit. Pour un prêtre âgé, moi je trouve le brave curé génial !

C'est le Carême. Dans la chaire, un Père dominicain était plein de son sujet. Le thème, pas étonnant à l'époque était : les sacrifices.

-Vous messieurs, laissez les cigarettes dans votre bureau. Pourquoi pas ? - Vous, gens mariés, privez-vous un peu des plaisirs légitimes. Le voilà qui se prend pour notre père spirituel

-Enfin, mesdames, laissez vos produits de beauté dans vos sacs. Là alors j'ai explosé : En voilà un qui n'a jamais lu l'Evangile . J'étais furieux, car pour la 1ère fois mes beaux-parents étaient là et mon futur beau-père n'admettait pas que ses filles se fardent.

C'est le Père VAILLIER qui a remplacé le Père FIRMIN

Avec lui, la page va rester blanche. Je n'étais pas un mauvais paroissien mais bien un paroissien fantôme. J'étais totalement "absorbé " par le collège des Jésuites.

 

VI (fin)

Vient alors le long "règne" du Père RAYMOND. Il a structuré la messe de 8h30 chaque matin et l'Office du samedi à 8h20.Le nombre des assistants a vite monté et atteint puis dépassé les 20 participants. Le nombre encore restreint permettait un échange après l'Evangile. II y en eut de très savoureux qui nous font encore sourire

Jésus disait à ses disciples : ne vous préoccupez pas de ce qui peut vous arriver. Pas un cheveu de votre tête ne tombe sans que votre Père des Cieux ne le sache. Se tournant vers moi avec un sourire, le Père Raymond dit "Gaby et moi, nous lui donnons de moins en moins de travail"

Et voilà maintenant le Père Lucien AURARD

Dans le psaume 89 il est dit : Le temps d'un soupir, nous avons achevé nos années : 70 est parfois la durée de notre vie. 80 si elle est vigoureuse. Lucien me dit "En voilà un qui resquille"

Je suis furieux, car je l'ai eu comme élève en math et il ne sait même plus compter ! En fait nous étions 9 à avoir plus de 80 ans !

II y eut à Saint-Ruf, un temps de restrictions intenses. Les hosties distribuées étaient partagées.

Un jour, une amie distribuant la communion m'a donné un si petit morceau d'hostie que je n'ai pu m'empêcher de lui dire "tu n'en as pas un plus petit ?" Le lendemain, Lucien distribuant la communion me dit : Tiens, je t'en donne deux !

Quant à Hervé, il y aurait beaucoup trop a dire. Un jour rentrant dans la chapelle de Saint-Joseph, je n'ai pas accepté qu'il s'efface devant moi "Non mon Père, honneur aux prêtres, moi je suis d'avant Vatican II".

Le petit mot après l'Evangile commence par ces mots : Dans l'église, il ne faut pas rester en arrière comme ce monsieur qui a exige que moi, prêtre, je passe avant lui. J'étais stupéfait "Comment, il a pris mes paroles au sérieux ?" Mais au moment de la communion il a dit : "Vatican II a permis que des laïques distribuent la communion, aussi, je vais demander à Gaby de venir m'aider, lui qui est passé allègrement d'avant le Concile de Trente après celui de Vatican II".

Depuis, je me méfie de ce que je dis dans la voiture qui nous emmène à Saint-Joseph : "Gaby n'ayant rien dit, discutez entre vous… ".

Gaby Bernard

 

En parcourant nos quartiers et nos rues - 4 par Michel HAYES

Troubadours et Félibres

I

Ancêtres des félibres, les troubadours trouvèrent place (conseil municipal du 2 février 1977) au plus près de la Rocade, aux abords du chemin du Lavarin : Bertrand de Ventadour (vers 1145-1180), du Limousin, fréquentant la cour du roi d'Angleterre Henri Il Plantagenêt ; avec ses quarante ou cinquante chansons, il est le "seul grand poète d'amour occitan" (Paul Zumthor). Plus authentiquement provençal, Raimbaut de Vacqueyras (né vers 1155), qui maniait dans ses poèmes l'occitan - disons, si nous préférons -, le provençal, la langue d'oil, le génois, le galicien, le gascon ; chevalier, engagé dans la quatrième croisade aux côtés de Boniface de Montferrat, il périt dans la région de Salonique en 1210 (même délibération municipale). Même si Joseph Roumanille (1818- 1891) ; rue a l'ouest et parallèle à l'avenue de Tarascon) est considéré comme le père du Félibrige (nom de la place au nord de la rocade, par délibération du 22 novembre 1967), celui-ci ne prit son essor qu'avec sa rencontre avec Frédéric Mistral (1830- 1914), puis dans la réunion des sept "primadiés" au château de Fontségugne (rue contiguë et même date), à Châteauneuf-de-Gadagne le 21 mai 1854. La même délibération du 22 novembre 1967 fut généreuse dans l'hommage rendu aux félibres avec les rues des "Îles d'or" (1876, même quartier), du "Poème du Rhône" (1897), oeuvres de F. Mistral, celle de "la Vénus d'Arles" (écrite en 1862), de Théodore Aubanel (même quartier et parallèle à la rocade), et, sans doute dans le sillage du centenaire, avec la place de la "Coupo Santo", que les félibres catalans commandèrent au sculpter Guillaume Fulconis pour remercier les Provençaux de l'hospitalité accordée à leur compatriote exilé Balaguer. Avec la délibération du 19 janvier 1971, l'avenue de la "Santo Estello" enserra entre la résidence du Lavarin et le stade Pierre Baizet (nom d'un résistant fusillé en 1944), les rues Xavier de Fourvières (pseudonyme d'Albert Rieux, né à Robion, 1853-1912), chanoine

II

prémontré de Frigolet et auteur du "Pichot trésor", (allée) Adolphe-Dumas (1806-1861), Antoine Crousillat (1814-1899), Jean Aicard (1848-192 1), Marius Jouveau (1878-1949), François Jouve (1881-1968), tous poètes, comme aussi moins connus les félibres François Favier (1849-1920) et Marius Fousson (1876-1955), Azalaïs Martin (18 34- 1917), mère de José d'Arbaud et Auguste Damian (1882-1944), qui régla la succession littéraire de Mistral. Bien d'autres noms évoquent encore les félibres dans nos quartiers : l'impasse "Mireille" ouvrant sur l'avenue Saint-Ruf, tire peut-être son nom du poème de Mistral (1859) et à coup sûr, au sud de l'avenue Antonio Vivaldi, la rue "Calendal", oeuvre du même (1867 ; C.M. du 10 juillet 1972). Au nord des places de la "Coupo Santo" et du Félibrige court l'avenue de "la Reine Jeanne", tragédie de Mistral (1896) ; reliant celle-ci à la rue des "Isles d'or", se trouve la courte rue "Nerto", poème du même génie (1884 ; C.M. du 12 avril 1974). La rue "Babali" nous renvoie à la nouvelle de Folco de Baroncelli (1910. Le Frère Savinien (1844-1926), des Écoles chrétiennes, se vit honoré par le C.M. du 22 novembre 1976, année du centenaire, du Flourège, société créée par Mistral à Avignon (L'impasse de ce nom située derrière la gare routière, donne sur l'avenue Saint-Ruf). L'impasse "Georges" (sic) donnant à l'ouest sur le chemin du Lavarin révèle peut-être, sous une forme erronée le chanoine Henri Georges (1890-1976), majoral du Félibrige. Le conseil municipal du 20 novembre 1984 débaptisa la (trop longue ?) rue de Provence, entre l'avenue Monclar et celle de la Violette pour la dénommer "Sang et or', qui sont les couleurs héraldiques héritées de la maison comtale de Barcelone.

 

 

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